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spectacle fort brillant. Un des soldats qui furent détachés revint avec transport en criant de toute sa force que les murailles étaient d’argent, tant l’espèce d’ivresse où les jetaient tant d’objets nouveaux leur montrait partout les métaux que cherchait leur avarice.

Toutes les rues et les places publiques se trouvèrent remplies de peuple, mais sans aucune espèce d’armes qui pussent donner du soupçon, et sans autre bruit que celui qui est inséparable de la multitude. Le cacique s’offrit à la porte de son palais. Il était d’une prodigieuse grosseur, et il s’approcha lentement, appuyé sur les bras de quelques officiers, au secours desquels il semblait devoir tout son mouvement. Sa parure était une mante de coton enrichie de pierres précieuses, comme ses oreilles et ses lèvres. La gravité de sa figure s’accordait avec le poids de son corps. Cortez eut besoin de toute la sienne pour arrêter les éclats de rire des Espagnols, et pour se faire cette violence à lui-même. Le discours du cacique fut simple et précis. Il le félicita de son arrivée ; il se félicita lui-même de l’honneur qu’il avait de le recevoir ; et, sans un mot inutile, il le pria d’aller prendre quelque repos dans son quartier, où il lui promit de conférer avec lui de leurs intérêts communs.

Les logemens qu’il avait fait préparer étaient sous les portiques de plusieurs maisons, dans un assez grand espace, où tous les Espagnols