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sèche et stérile, sans eau douce et sans autres plantes que quelques gaïacs et des broussailles, elle fut bientôt abandonnée de ses nouveaux habitans, qui passèrent à la Marguerite. Ils ne regrettèrent qu’une jolie ville qu’ils avaient bâtie dans un excellent port sous le nom de Nouvelle-Cadix, et une fontaine odoriférante, dont l’eau passe pour médicinale, et surnage sur celle de la mer. Les insulaires naturels avaient le corps peint, et vivaient des huîtres dont ils tiraient les perles. On remarqua que les pourceaux qu’on avait apportés de Castille, et qui multiplièrent beaucoup, prirent une forme qui les faisait méconnaître : leurs ongles, s’il en faut croire l’historien, s’allongèrent d’un demi-pied en hauteur.

Dans le cours de la même année 1508, l’établissement de Portoric, dont Jean Ponce avait jeté les fondemens sous les auspices de la paix, fut achevé par la violence. Agueynaba était mort ; et son frère, qui lui avait succédé, n’avait pas hérité de son affection pour les Espagnols. Ponce commença par bâtir une bourgade, et voulut faire ensuite des départemens à l’exemple d’Espagnola ; mais il reconnut qu’il s’était trop flatté en croyant pouvoir disposer des insulaires comme d’un peuple conquis. Si la réputation des Espagnols, qu’ils regardaient encore comme autant de dieux descendus du ciel, leur avait d’abord imposé, ils n’eurent pas plus tôt senti la pesanteur du joug, qu’ils cherchèrent les moyens de s’en délivrer :