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et fondue dans un mélange de peuples originairement étrangers. Si l’on y découvre des mots, soit radicaux, soit dérivés chinois ou japonais, tartares ou même américains, on saisira peut-être le fil de la génération ou de la transmigration de ces peuples à travers les ramifications de leurs langues. Quelques vocabulaires des langues les plus sauvages et les plus éloignées, soit pour le climat, soit pour la forme et le son, peuvent jeter un grand jour sur cette branche obscure des sciences, qui a été la première cultivée et la dernière approfondie, parce qu’on a long-temps usé des fruits, sans faire attention à l’arbre. Ces sortes de vocabulaires doivent faciliter l’exécution du projet d’un archéologue universel. Un si beau projet avait été conçu par des philosophes. L’auteur du Mécanisme des langues avait essayé de l’exécuter en partie. Celui du Monde primitif en a embrassé toute l’étendue, et a déployé une érudition aussi utile que profonde, quoiqu’elle soit nécessairement conjecturale.

Quand on possédera une nomenclature des mots principaux de chaque langue, c’est-à-dire, des mots qui désignent les choses communes à tous les hommes, alors il sera plus facile de trouver les racines de plusieurs dialectes, et de découvrir la langue-mère de certains climats. On distinguera dans chaque pays les mots qui y sont nés, pour ainsi dire, de la terre même et de ses productions ; et les mots qui y sont venus avec les transmigrations des peuples étran-