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» Nous n’eûmes dans tout ce voyage par eau qu’une seule incommodité à laquelle il ne fut pas possible de trouver le moindre remède ; c’étaient les cousins, dont il y a des quantités prodigieuses dans tous les endroits où nous passâmes. Ils s’attachent à toutes les parties du corps qui sont découvertes ; ils pénètrent avec leur trompe jusque dans la peau, en sucent le sang jusqu’à ce qu’ils en soient rassasiés, et s’envolent ensuite. Si on les laisse faire, ils couvrent entièrement la peau, et causent des douleurs insupportables. On m’a même assuré qu’à Ilimsk, ils tourmentent quelquefois si cruellement les vaches, qu’elles en tombent mortes. Le cousin des bords de l’Irtich est d’une espèce très-délicate ; on ne peut guère le toucher sans l’écraser ; et si on l’écrase sur la peau, il y laisse son aiguillon, ce qui rend la douleur encore plus sensible. Sa piqûre fait enfler la peau aux uns, et à d’autres ne fait que des taches rouges, telles qu’en font naître les orties. Le moyen usité dans le pays pour s’en garantir est de porter une sorte de bonnet fait en forme de tamis, qui couvre toute la tête, et qui n’ôte pas entièrement la liberté de la vue. On met autour des lits des rideaux d’une toile claire de Russie. Nous employâmes ces deux moyens, mais nous trouvâmes de l’inconvénient à l’un comme à l’autre. Le premier causait une chaleur incommode qui se faisait sentir à la tête, et devenait bientôt insupportable. L’autre moyen nous parut d’abord sans effet : nos lits