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trouva beaucoup de cercueils remplis de corps morts, et qu’on pouvait aisément ouvrir. Ce sont des cadavres de gens qui sont morts de mort violente, ou sans sacremens, et qui ne peuvent pas être enterrés avec ceux qui les ont reçus, ou dont la mort a été naturelle. Près de ces bières, il y avait un grand concours de monde, soit parens des morts, soit inconnus, qui venaient prendre congé des défunts : « Car, disent-ils, quoique nous ne soyons pas parens, les morts peuvent dire un mot en notre faveur. » Ce n’est pas qu’ils croient que ceux qui ne sont pas morts dans les règles ne puissent pas être sauvés : ces morts, selon les dévots de Tobolsk, ne restent pas au-delà d’un an dans cet état ; et quelques-uns même n’ont pas si long-temps à attendre. Suivant cette opinion, tout ce qui meurt dans l’année, entre les deux jeudis antérieurs à celui qui précède les fêtes de la Pentecôte, reste sans être inhumé jusqu’à ce dernier jeudi ; et est gardé dans ce magasin de morts. S’il arrive que quelqu'un meure le jeudi même, il faut qu’il attende une année entière sans être enterré : si au contraire il ne meurt qu’un seul jour avant, il l’est dès le lendemain. Ce jeudi est appelé toulpa en langue russe ; mais la plupart le nomment sedmik, parce que, depuis le jeudi-saint jusqu’à celui-ci, il y a sept semaines. Ce même jour, l’archevêque de Tobolsk fait une procession solennelle avec son clergé jusqu’à cette maison ; et, après avoir