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terre dont les habitans ont l’hiver quand nous avons l’été, et leur été durant notre hiver.

C’est ainsi que les fausses notions de la nature ont engendré les fausses idées de la Divinité. L’homme, en général, tire ses lois, ses mœurs et ses opinions religieuses de son climat. À la vérité, les conquêtes et les transmigrations modifient, altèrent et défigurent quelquefois l’histoire civile et religieuse d’un pays et d’une nation, comme son caractère, sa langue, sa physionomie. Mais, tant qu’un peuple sauvage restera ignoré dans l’enceinte d’un pays borné par les eaux ou les montagnes, il prendra ses dieux dans ses bois, dans la mer, dans les cavernes, dans les lieux sombres ou majestueux ; en un mot, dans les grands objets ou les grands effets de la nature. La peur guidera toujours sa marche dans ses superstitions, et s’il cesse de craindre les fantômes créés par son imagination, ce sera pour s’effrayer d’autres fantômes étrangers.

La faiblesse de l’homme le rend timide ; l’expérience du mal, peureux, et l’ignorance , crédule et fou dans ses peurs. Cependant la superstition des Kamtchadales n’est pas toujours aveugle et mal raisonnée. Ils appellent, dit-on, bien et vertu ce qui satisfait leurs désirs et leurs besoins, faute et mal ce qui peut leur nuire. Monter sur les volcans, c’est s’exposer à une perte certaine, c’est commettre un crime que le ciel doit venger. Jusque-là leur crainte est raisonnable ; mais voici une opinion qu’on doit