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révolte des habitans d’Outkolok, en 1740, continue le même voyageur, toutes les femmes, à l’exception d’une fille qu’ils n’eurent pas le temps d’égorger, furent massacrées par les hommes, et ceux-ci se précipitèrent dans la mer du haut de la montagne où ils s’étaient réfugiés. » Est-ce là de la lâcheté ou de la faiblesse ?

Ce peuple, exposé à tant de maux qui lui viennent de la nature ou des hommes, n’est pas sans quelques plaisirs. Il connaît le doux lien de l’amitié ; il sait exercer l’hospitalité. Elle consiste, entre amis, à se régaler. Un Kamtchadale en invite un autre à manger : ce sera de la graisse de phoque ; l’hôte en coupe une longue tranche ; il se met à genoux devant son convive assis ; il lui enfonce cette graisse dans la bouche, en criant d’un ton furieux tana (voilà) ; et, coupant avec son couteau ce qui déborde des lèvres, il le mange ; mais ce ne sont là que les invitations familières : les repas de cérémonie ne se font pas à si bon marché ; aussi ne se donnent-ils point sans intérêt.

Quand un Kamtchadale veut se lier d’amitié avec un de ses voisins, il l’invite à manger : il échauffe d’avance sa yourte, et prépare, de tous les mets qu’il a dans ses provisions, assez pour rassasier dix personnes. Le convié se rend au festin, et se déshabille, ainsi que son hôte : on dirait un défi à coups de poings. L’un sert à manger à l’autre, et verse du bouillon dans une grande écuelle, sans doute pour aider à la digestion par la boisson. Pen-