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défendent point en cas d’attaque. Quand les jeunes, fatigués de nager, grimpent sur le dos de leur mère, celle-ci plonge dans l’eau pour les y renverser. On dirait qu’ils n’aiment pas la mer, tant ils s’empressent de gagner le rivage quand on les jette à l’eau.

Ce phoque, redoutable par sa grosseur, ses dents, ses rugissemens, sa figure et son nom même, est pourtant si timide, qu’il fuit à l’approche d’un homme, soupire, tremble, et tombe à chaque pas, tant sa graisse lui rend la marche pénible ; mais, quand il n’a plus de salut que dans son désespoir, alors il met à son tour son agresseur en fuite, surtout s’il est en mer, où, dans les bonds de sa fureur, il peut submerger les canots et noyer les hommes. Le plus hardi pêcheur, ou chasseur, va contre le vent lui plonger dans la poitrine, au-dessous des pates de devant, un harpon attaché par une longue courroie, qui tient à un pieu dans le canot ; les autres pêcheurs percent ensuite de loin l’animal à coups de flèches ; et quand il a perdu ses forces, ils s’approchent pour l’achever à coups de lance ou de massue. Quelquefois on lui décoche des dards empoisonnés ; et, comme l’eau de mer irrite sans doute les blessures, l’animal gagne la côte, où on le laisse mourir, si l’on ne peut l’aborder aisément.

C’est un honneur pour les Kamtchadales de tuer des phoques ; un déshonneur de jeter dans la mer un de ces animaux, quand ils l’ont chargé dans leur canot. Ils risquent plutôt