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tions, soit d’hiver ou d’été. On la coupe avec une omoplate de baleine ou même d’ours, façonnée en faux, et qui, aiguisée sur des pierres, devient tranchante comme du fer.

Une autre sorte d’herbe ou de jonc non moins utile à ce peuple qui manque de tout, c’est le bolotnaïa ou tonchitch, nom d’autant plus remarquable, qu’il désigne cette plante dans les usages superstitieux des Kamtchadales. Elle leur sert d’ouate pour envelopper leurs enfans quand ils viennent au monde : ils leur en mettent encore, au lieu de langes, à l’ouverture qu’ils ménagent dans le berceau pour la propreté. Quand cette herbe est humide, ils l’ôtent pour en mettre de nouvelle. Cette herbe tressée sert encore de bas, qui sont très-bien tendus sur la jambe. Cette herbe se carde avec un peigne fait d’os d’hirondelles de mer, et se prépare comme le lin, que les Kamtchadales n’ont pas, non plus que le chanvre ; mais ce peuple sauvage y supplée par l’ortie : il l’arrache au mois d’août, et la laisse sécher dans les cabanes le reste de l’été. Quand l’hiver arrête la pêche et les travaux du dehors, on prépare l’ortie. Après avoir fendu la tige en deux, on tire adroitement l’écorce avec les dents ; ensuite elle est battue, nettoyée, filée entre les mains, et roulée autour d’un fuseau. Le fil à coudre n’est point retors, mais on tort en double celui qu’on destine à faire des filets ; car c’est là le principal usage de l’ortie. Comme on ne fait ni rouir la plante, ni