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Les batogues sont une simple correction de police que le militaire emploie envers le soldat, et la noblesse envers les domestiques. L’auteur décrit une de ces corrections dont il a été témoin. C’était une fille de quatorze à quinze ans que deux esclaves russes traînent au milieu d’une cour ; ils la déshabillent nue jusqu’à la ceinture, la couchent par terre ; l’un prend sa tête entre ses genoux, l’autre la tient et l’étend par les pieds. Tous les deux, armés de grosses baguettes, la frappent sur le dos jusqu’à ce que deux bourreaux (c’étaient les maîtres de la maison) aient crié c’est assez. Cette fille, belle et touchante, se releva couverte de sang et de boue. C’était une femme de chambre qui avait manqué à quelque léger devoir de son état. Les Russes prétendent qu’ils sont obligés de traiter ainsi leurs domestiques pour s’assurer de leur fidélité ; mais les maîtres, avec cette précaution, doivent vivre dans une méfiance perpétuelle de tous les gens qui les approchent. Ce sont de petits tyrans qui ne peuvent dormir tranquilles entre le poignard de leurs esclaves et le glaive de leur despote.

Cette réflexion conduit à la description du supplice du knout, exercé sur une des premières femmes de l’empire de Russie. C’était madame Lapouchin, dont la beauté jetait un grand éclat à la cour de l’impératrice Élisabeth.

Accusée de s’être compromise dans une conspiration que tramait un ambassadeur étranger, elle fut condamnée à recevoir le knout.