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« J’avoue en même temps que je n’aurais pas voulu risquer de voyager aussi solitairement entre Tobolsk et Moscou, où les Russes Rosboniches, quoique baptisés et chrétiens, n’auraient certainement pas manque de m’enlever la plus grande partie de mes effets.

» Certaines raisons m’obligèrent de m’arrêter pendant quinze jours chez les Ostiaks, qui habitent le long de l’Obi. Je logeai dans leurs cabanes ; le peu de pelleterie que j’avais resta, pendant tout mon séjour, dans une tente ouverte, habitée par une nombreuse famille, et je ne perdis pas la moindre chose.

» Voici encore un trait de la probité de ces peuples, qu’un marchand russe m’a raconté.

» Ce marchand, allant de Tobolsk à Beresof, ville située à douze journées au nord de la première, passa la nuit dans une cabane d’Ostiaks. Le lendemain matin, il perdit, à quelques verstes de sa couchée, une bourse dans laquelle il y avait environ cent roubles. Les routes de ces cantons ne sont guère fréquentées ; mais le fils même de l’Ostiak qui avait donné l’hospitalité au Russe, allant un jour à la chasse, passa par hasard à l’endroit où cette bourse était tombée, et la regarda sans la ramasser. De retour à la cabane, il se contenta de dire qu’il avait vu une bourse pleine d’argent, et qu’il l’y avait laissée. Son père le renvoya aussitôt sur le lieu, et lui ordonna de couvrir la bourse d’une branche d’arbre, afin de la dérober aux yeux des pas-