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au-dessous d’Yakoutsk. Il semblait, disait-il, que le ciel et la terre fussent conjurés contre lui, qu’ils eussent suscité tous les élémens pour le traverser de toutes les façons imaginables dans les entreprises qu’il avait formées pour l’accroissement des sciences, au mépris même de sa vie. Le ciel avait été presque continuellement couvert de nuages, et le grand froid avait gâté tous ses instrumens météorologiques ; en sorte qu’il ne lui restait plus aucun de ses meilleurs thermomètres, les ayant tous emportés avec lui, pour n’en pas manquer dans des lieux où il comptait pouvoir surprendre le froid presque à sa véritable source. Il ajoutait que, voulant savoir jusqu’à quelle profondeur la terre était gelée dans ce rigoureux climat, il s’était servi de la houe ; mais que la terre, pour éluder ses recherches, avait pris la dureté du marbre ; qu’elle ne s’était laissé pénétrer en aucun endroit, et que les plus forts instrumens de fer s’étaient brisés sous les efforts redoublés des plus robustes travailleurs ; qu’il n’avait pas, en août, trouvé l’eau plus docile qu’au commencement de février. Ayant fait creuser la glace jusqu’à l’eau courante, pour voir si l’eau dans ces cantons, sans perdre sa fluidité, était susceptible d’un plus fort degré de froid que dans les pays où le point de congélation est à 150 degrés, selon la division de Delisle, son frère, et à 32 degrés, suivant la division de Fahrenheit, il avait suspendu par ce trou le seul thermomètre qui lui restait, et que dix ou douze minutes