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main : on le passait partout en traîneaux. La glace devint si épaisse en peu de jours, que l’on pouvait en tirer des morceaux considérables pour l’usage des habitans, car on fait ici de la glace unie un usage dont on n’a point d’idée ailleurs ; elle sert à calfeutrer les maisons. Pour peu que les fenêtres d’un logis ne ferment pas comme il faut, elles ne sauraient suffisamment garantir les chambres du froid extérieur. Les caves mêmes dans lesquelles on garde la boisson, comme bière, hydromel, vin, etc., ne peuvent pas être à l’abri du grand froid par les moyens ordinaires, telles que de bonnes portes, du fumier de cheval, etc. C’est la rigueur du froid même qui fournit le moyen le plus sûr d’empêcher qu’il ne pénètre dans les habitations. On coupe de la glace bien nette, et dans laquelle il n’y ait point d’ordure : on en taille des morceaux de la juste grandeur des fenêtres et des ouvertures, et on les y applique par-dehors, comme on fait ailleurs de doubles châssis de verre. Pour qu’ils tiennent, on ne fait qu’y verser de l’eau, qui, en se gelant, les attache fortement aux ouvertures. Ces vitraux de glace n’ôtent pas beaucoup de lumière : lorsqu’il y a du soleil, on voit aussi clair qu’à travers des châssis de verre ; et quelque vent qu’il fasse au-dehors, le froid n’entre jamais dans les chambres. Les gens aisés, dont les maisons ont des fenêtres, appliquent les vitraux de glace par-dedans, et par là ne souffrent point du tout des froides émanations de