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Il ne veut point qu’on mêle à de si saintes chaînes Le joug humiliant des passions humaines, Il ne veut que des cœurs que lui-même a choisis , Étrangers à la terre, et de lui seul remplis. Vous dont l’âme sensible au sein de l’innocence Des penchants de votre âge a connu la puissance , Que Dieu n’appelle pas avec l’autoritë Qui soumet nos désirs et notre volonté, C’est à d’autres vertus qu’il vous a destinée. Vous n’êtes point à vous votre âme est enchaînée. Dieu ne recevrait point le tribut imposteur De serments démentis au fond de votre cœur. Ne les prononcez pas : je dois vous le défendre.



Est un effort pénible, et dont il faut douter ;

Les obstacles pourtant ne sauraient m'arrêter. [530]

Je dirai ce qu'il faut pour fléchir votre père,

Mon devoir me l'ordonne, et j'y vais satisfaire.

Ce n'est que par degrés qu'on le peut ramener :

Le péril est pressant, il le faut détourner.

D'abord votre santé qui parait affaiblie, [535]

Exige le délai de la cérémonie,

Et si j'obtiens ce point, nous pouvons espérer,

Mais dans tous ses desseins s'il veut persévérer,

S'il brave mes discours et votre résistance,

Ma fille, contre lui, quelle est votre défense ? [540]

On vous opposera votre consentement,

Pourquoi, vous dira-t-on, ce soudain changement ?

Pourquoi faire si tard éclater vos murmures,

Pour nous ravir le fruit des plus justes mesures ;

Tout sera contre vous. Pardonnez ce discours. [545]

Je dois vous protéger, je le veux et j'y cours.

Mais n'attendez pas tout des soins où je m'engage,

Comptez plus sur vous même et sur votre courage.

Le ciel voit vos chagrins, il pourra les calmer,

Il veille sur ce cœur qu'il se plût à former. [550]

Vous vaincrez un amour qui peut être excusable,

Mais qui fait vos tourments et vous rendrait coupable.

Mélanie se lève avec des gestes de douleur. Le curé se lève aussi.

Allez, rassurez-vous, vous êtes sous les yeux

Du dieu consolateur qui reste au malheureux.

Comptez sur mes secours : souffrez que ma présence [555]

Vous porte quelquefois une faible assistance.

Vous aurez en tout temps contre un sort ennemi

Le ciel et vos vertus, une mère, un ami.

MÉLANIE

Eh ! comment à mon père oser me faire entendre ?

Comment de son pouvoir aujourd’hui m’affranchir.

Et braver un courroux que rien ne peut fléchir ?

M’exposer à sa haine, à sa haine immortelle !

Quel reproche il ferait à sa fiUe rebelle !

Je sens que j’ai donné des armes contre moi.

Je frémis.... Pardonnez.... Vous voyez mon effroi.

C’est au ciel 2 c’est à vous qu’il faut que je m’adresse :

Prévenez mes malheurs , soutenez ma faiblesse.

Ayez pitié d’un cœur qui ne peut se dompter.

Qui ne peut obéir, qui ne peut résister.

Ma cause est dans vos mains, j’attends de vous la vie.

LE CURÉ

.

Rassurez- vous ; ma voix, par Dieu même affermie,

Réclamera des * lois que l’