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D'un père rigoureux n'êtes-vous pas complice ?

Venez-vous m'annoncer l'instant du sacrifice ?

C'est celui de mes jours... C'est celui de mon coeur...

Il est affreux, barbare... Il me glace d'horreur...

Ah ! Qu'on l'achève au moins, qu'on l'achève sur l'heure... [255]

Traînez-moi vers l'autel... Traînez-moi... Que j'y meure.

C'est tout ce que l'on veut et j'y consens.

LE CURÉ

Hélas !

Au but qui me conduit ne vous méprenez pas.

J'apporte à vos douleurs l'intérêt le plus tendre.

Je puis les adoucir, si vous voulez m'entendre. [260]

Donnez-leur avec moi ce libre épanchement

Qui pour les malheureux est un soulagement.

Les consoler, ma fille, est tout mon ministère ;

Vous me devez enfin regarder comme un père.

MÉLANIE, toujours égarée.

Un père !... Il m'en faut un... Que n'ai-je un père, hélas ! [265]

Il plaindrait mes tourments, il m'ouvrirait ses bras.

Ce nom doit consoler... ce nom me désespère.

Faut-il éterniser mes tourments, ma misère,

Livrer à la douleur le reste de mes jours,

Promettre de souffrir et de pleurer toujours ? [270]

Je n'en ai pas la force et ma raison s'égare.

La nature et le ciel, tout me semble barbare.

LE CURÉ

C'est que tous deux, ma fille, ont été méconnus.

Commandez un moment à vos sens éperdus,