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de Mme  de La Guette.

voir de ses lettres ; et même en ce temps le grand chagrin qui me dévoroit commença à se dissiper. Je repris mes divertissements ordinaires, en attendant le retour de mon amant.

Mon père, qui étoit persécuté de gendres prétendants, m’en disoit toujours quelque mot à la traverse, quoiqu’il m’eût promis de ne m’en plus parler. Mais comme les pères sont nos supérieurs, ils ne nous tiennent parole que tant qu’il leur plaît ; et nous devons toujours écouter ce qu’ils nous disent, avec respect, puisqu’ils ne recherchent que notre avantage. Il en fut tout autrement à mon égard. La forte inclination que j’avois pour le sieur de la Guette me porta à la désobéissance, ce que les filles bien nées ne doivent jamais faire. Il est vrai que ma mère et ma sœur approuvèrent mon choix, et qu’elles me fortifièrent de plus en plus dans ma résolution, le jugeant digne de moi. Il revint donc de l’armée dans le temps que l’on conduisit madame la duchesse de Lorraine à Paris[1], où il eut l’honneur de l’accompagner ; et aussitôt après il vint chez nous pour poursuivre son des-

  1. La duchesse Nicole. Après l’occupation de Nancy par les François, Charles IV abdiqua en faveur de son frère, le cardinal François, qui épousa aussitôt la princesse Claude, sœur de la duchesse. Mécontente de cette révolution de palais qui la détrônoit, et pour laquelle on ne lui avoit pas demandé son consentement, Nicole se retira à Paris. C’étoit en 1634. « Elle arriva à Paris le 7 mai, dit la Gazette de France, accompagnée du vicomte d’Arpajon et des compagnies de… La Luzerne… » M. de la Guette faisoit apparemment partie de cette dernière compagnie.