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de Mme  de La Guette.

réchal de batailles[1]. Je dis ces choses afin que l’on voye que je ne m’étois point trompée dans mon choix, puisque deux si grands rois ont eu de la considération pour luy. Cette première absence me fut assez rude, et tous mes divertissements avec mes belles voisines m’étoient presque à charge. Je ne recherchois plus que la solitude pour rêver à cet objet, et moi qui avois été la plus gaie et la plus enjouée de toutes les filles, je devins la plus mélancolique du monde, et j’étois à charge à tous ceux qui me voyoient. Mes trois compagnes se marièrent en ce temps-là et furent emmenées hors du pays. Je demeurai donc seule dans mon chagrin, sans oser dire ce qui le causoit. Je fis cependant amitié avec une jeune veuve qui n’étoit pas des plus sottes ; ce qui soulagea beaucoup ma douleur, parce que, insensiblement et avec le temps, je lui en dis la cause, la croyant assez discrète pour le taire. C’est une chose bien douce que d’avoir une confidente à qui l’on peut tout dire. Je le pouvois faire avec d’autant plus d’assurance, que mon amour étoit chaste et honnête. Le sieur de la Guette, de son côté, n’étoit pas moins agité

  1. Le maréchal de bataille marchoit après les maréchaux de camp, recevoit des maréchaux de logis le logement de l’infanterie, le terrain de campement, rangeoit les troupes avec l’aide des sergents de bataille, visitoit les postes, écoutoit les plaintes, y faisoit droit et transmettoit les ordres en employant comme ordonnances les arquebusiers à cheval. Il est probable, ajoute le général Bardin, que l’emploi, sinon le titre, existoit depuis qu’il fut donné des chefs aux sergents de bataille.