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Mémoires

sur le bord de la mer avec de la cavalerie, en eut tout le passe-temps, et me dit à son retour qu’il m’y avoit souhaitée plusieurs fois, sachant fort bien que ce bruit-là m’étoit plus agréable que les meilleures symphonies qu’on pourroit entendre. Je puis dire que j’ai eu toutes les satisfactions du monde à La Haye jusqu’à la mort de mon cher fils, la plupart des dames y étant civiles et honnêtes, et m’ayant toujours témoigné beaucoup de bonne volonté, dont je leur suis fort obligée ; aussi je les estime et les honore infiniment, principalement celles qui le méritent ; car je sais fort bien faire la distinction.

Mon fils y étoit aussi satisfait et y servoit avec plaisir. Son Altesse ayant de la considération pour lui et étant estimé de tous les gens de la cour. Je sais bien qu’il faisoit aussi tout son possible pour mériter l’honneur de la bienveillance d’un si grand prince, qui eut la bonté de le gratifier incontinent après du régiment de cavalerie de feu M. le prince Frédéric de Nassau[1]. Il servit donc avec affection et honneur jusqu’au dernier soupir de sa vie, qu’il finit au siége de Maestricht[2] par une malheureuse et fatale canonade qui le frappa à la cuisse ; mais le grand Dieu, qui est tout bon, lui fit la grâce qu’il vécut encore deux heures, pour avoir le temps de lui demander pardon de ses fautes et d’implorer sa miséricorde pour mourir en véritable chrétien et

  1. Cousin du prince d’Orange.
  2. 29 juin 1673. Le roi la prit en treize jours.