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Mémoires

Quand nous fûmes arrivés à Paris, mon mari alla d’abord trouver M. Philippe, qui ne manqua pas de me venir prendre dans son carrosse pour aller le soir chez la reine avec mon mari. Nous y arrivâmes justement à la levée du cercle ; la reine étoit entrée dans son cabinet. Nous attendîmes bien une demi-heure avant que d’y entrer. J’étois si lasse et si fatiguée que je ne pus pas m’empêcher de me mettre sur un des bras du fauteuil de la reine dans la salle du cercle, ce qui fit qu’un huissier me vint dire de m’ôter et que personne ne se mettoit là. Je lui dis que je n’en pouvois plus, qu’il m’étoit impossible de demeurer plus longtemps debout, et que j’attendois l’heure de la reine pour me présenter à Sa Majesté. Il eut quelque sorte de compassion de moi et ne me parla plus. M. Philippe fut gratter à la porte du cabinet et dit à l’huissier de dire à la reine que nous étions là. Sa Majesté commanda qu’on me fît entrer. Je l’approchai en faisant plusieurs révérences, et lui dis : « Madame, je suis ici pour rendre compte à Votre Majesté de ce que j’ai fait en mon voyage. » Lui en ayant dit ce qui en étoit, cette grande reine me dit qu’elle étoit bien aise que je fusse arrivée à bon port, et qu’elle se souviendroit de mes services. Elle me demanda aussi si j’avois fait le voyage en habit d’homme. Je lui dis : « Madame, je l’ai fait en l’état que j’ai l’honneur de paroître devant Votre Majesté. » Mon mari s’approcha ensuite et fit une profonde révérence ; puis il dit : « Madame, je