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Mémoires

le contraire. M. de Riberac vouloit prendre la peine de venir ici ; mais je l’ai prié de n’en rien faire. Il vouloit aussi dépêcher un courrier à la cour pour donner avis au roi que l’on tenoit M. le comte de Marsin arrêté dans Riberac ; mais je lui ai dit des raisons qui l’en ont empêché absolument. Allons le trouver afin de le désabuser. » Nous partîmes pour aller au château ; un de ces messieurs me présenta la main et les autres suivirent. Tout le monde étoit aux portes et aux fenêtres pour me voir passer, n’ayant point encore eu d’éclaircissement de ce qui en étoit. Comme nous fûmes dans l’avant-cour de M. de Riberac, il y vint à ma rencontre et me salua. Je lui dis : « Monsieur, votre espérance est perdue ; car vous croyiez tenir M. le comte de Marsin et vous voyez que ce n’est qu’une femme. » Je levai mes coiffes pour lui faire voir mon visage plus amplement. « Il est vrai, me dit-il, que c’est une femme ; mais ce n’est pas une femme du commun. Sain-Preüil est cause que j’ai pensé faire une bonne bévue. Le gouverneur de Bourdeilles vous avoit prise, quand vous y passâtes, pour un prince qui s’alloit joindre au parti de M. le prince de Condé. Je le sus trois ou quatre jours après ; mais présentement il a de quoi se venger. — Et moi, Monsieur, lui dis-je, je dois être satisfaite au dernier point, puisque l’on m’a prise pour un homme de qualité et pour un très-grand général. » Il nous pria d’entrer chez lui, et tous les messieurs qui nous avoient suivis se retirèrent, à la réserve de