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de Mme  de La Guette.

allai à Paris pour y séjourner, mes maisons étant pour lors inhabitables et l’air fort infecté dans le pays. J’y visitai toutes mes bonnes amies, qui me reçurent avec beaucoup de joie. J’eus aussi un entretien particulier avec M. Philippe, qui étoit échevin de la ville et maître d’hôtel chez le roi, et de plus bon et véritable François[1]. Comme nous parlions ensemble de l’équipée des Lorrains et de leur levée de boucliers, je lui fis connoître tout ce que j’avois fait pour le service du roi. Il me dit : « Madame, la chose est trop de conséquence pour n’être point sue. C’est un coup du ciel ; et j’en avertirai la reine. » Il étoit assez bien auprès de sa Majesté pour plusieurs raisons. La supérieure du Val-de-Grâce étoit sa belle-sœur et se nommoit madame Compan, de qui la reine faisoit un cas extraordinaire, parce que c’étoit la meilleure religieuse du monde et la plus capable de gouverner une communauté. En un mot, son mérite a fait qu’elle a été continuée dix-huit ans supérieure. M. Philippe fut trouver la reine pour lui dire la chose mot à mot comme je la lui avois dite. Sa Ma-

    joignit aussitôt ses troupes à l’armée de Lorraine et prit la route de la Flandre avec elle.

  1. L’échevin Philippe étoit, en effet, très-bon royaliste. Son nom figure au bas de la lettre que les prévôt des marchands et échevins écrivirent au roi vers la fin de juin 1652, pour le prier de laisser entrer dans Paris le pain de Gonesse. Le roi ne manqua pas de répondre « qu’il travailloit pour la délivrance et le soulagement du peuple. » C’étoit le but principal de la lettre. Les deux pièces furent publiées immédiatement et répandues par la ville.