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de Mme de La Guette.

dame, me dit-il, comme vous êtes fort considérée ici, il n’y a personne qui ne fasse ce que vous souhaiterez. Il seroit nécessaire, pour le service de son Altesse, que nous eussions un homme qui allât reconnoitre dans l’armée du roi ce qui s’y passe, et s’il n’y a point de pont de bateaux ; il peut s’assurer qu’il sera récompensé hautement. » Je lui promis de lui en donner un qui étoit cavalier dans le régiment de Richelieu, que je connoissois. Je l’envoyai chercher sur-le-champ et l’assurai qu’il seroit fort capable pour cela, mais qu’il étoit nécessaire que je l’entretinsse en particulier aussitôt qu’il seroit entré dans ma chambre, pour le porter à faire la chose, et que j’étois persuadée qu’en ma considération il entreprendroit tout. Le cavalier vint donc, et je le tirai à quartier pour lui parler et pour l’instruire de ce qu’il devoit faire ; puis je le pris par la main et dis au major : « Monsieur, voilà un homme qui fera tout ce que vous lui ordonnerez. » Il lui dit : « Mon camarade, ce qu’il y a à faire est de partir tout présentement pour aller dans l’armée du roi et reconnoitre ce qui s’y passe, et surtout s’ils n’ont point de pont de bateaux. Cela fait, il faut vous en revenir promptement pour m’en faire votre rapport. Son Altesse de Lorraine vous en récompensera de façon que vous serez satisfait. Ma lieutenance est vacante : je vous la donne, sans ce que vous aurez de son Altesse. »

Le cavalier étoit bon serviteur du roi et ne fit que ce que je lui avois dit. Il feignit seulement de s’y