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Mémoires

tiennent prêts, sans vous en donner avis, comme vous pouvez croire. Servez-vous de ce que je vous dis, et en donnez avis à votre duc au plus tôt ; car je vous assure qu’il y aura peu des vôtres qui retrouve le loquet de sa porte. Ne perdez point de temps, encore une fois ; courez vite. » Il me quitta brusquement et me laissa sur ce four à chaux. Il prit le cheval d’un Lorrain qui entroit dans le parc, et s’en alla au grand galop trouver M. le duc de Lorraine, qui étoit à l’arrière-garde de son armée, pour lui dire tout ce que je lui avois dit. Son Altesse y donna entièrement créance ; et je m’en aperçus une demi-heure après, et en louai Dieu de tout mon cœur. Je descendis de dessus mon four et montai à une chambre de ce pavillon. Aussitôt que je fus à la fenêtre, regardant toujours leur armée, qui s’approchoit fort de celle du Roi parce que mon major n’avoit pas encore eu le temps de faire son rapport à M. de Lorraine, quoiqu’il donnât des deux à son cheval de toutes ses forces, M. le Prince, qui commandoit l’avant-garde, s’en vint à la porte de ce pavillon et appela : « Vibrac ! Vibrac ! » Je lui répondis de ma fenêtre, et lui dis : « Monseigneur, il est au château. Votre Altesse veut-elle entrer ? » Il me dit : « Non, il y auroit trop de confusion si j’entrois. Que Vibrac me fasse seulement apporter quelques bouteilles de vin ; car j’ai grande soif. » Je lui dis : « Monseigneur, je vas le faire avertir promptement. » M. de Vibrac vint au plus vite et fit ap-