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Mémoires

petit obstacle : une personne que je ne veux point nommer fit tout son possible pour en détourner madame la marquise de Clermont, et lui proposoit en même temps un autre parti fort riche, d’un grand seigneur. Cela embarrassoit un peu cette dame. L’on m’avertit de la chose ; je la fus trouver pour lui dire : « Madame, je viens ici pour savoir de vous quand il vous plaît que l’on fasse le contrat de mariage de mademoiselle votre fille avec M. de Marsin. Je sais, madame, qu’il ne vous désagrée pas, et que, comme la reine lui donne peu de temps pour s’en retourner en Catalogne, il est juste que vous vous pressiez aussi. » Elle ne savoit que me répondre ; elle auroit bien voulu éluder la chose, me disant : « Que M. de Marsin fasse la campagne, et nous verrons à son retour. » Je connus fort bien où gisait le lièvre, et lui dis : « Madame, il n’est plus question de voir ; il faut faire. — Comment voulez-vous que je fasse ? me dit-elle ; que je donne ma fille à un étranger ? — Cet étranger, madame, lui repartis-je, en vaut cinquante de notre nation, et des plus huppés ; et puis, madame, la chose est si avancée que vous ne pouvez pas honnêtement vous en dédire. — Eh bien ! dit-elle, vous le voulez ? je vous l’accorde. Vous direz, s’il vous plaît, madame, à M. de Marsin qu’il sera mon gendre dans huit jours, et que je souhaite que M. le Prince m’en fasse la demande d’honneur. Il est assez bien auprès de Son Altesse pour obtenir cette faveur-là. — Madame, lui dis-je, je n’en