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de Mme  de La Guette.

pas mon fils ; mais par bonne fortune il étoit allé à l’écurie voir les chevaux. Ce malheureux lui fut demander la clef de la chambre pour aller serrer quelque argenterie qui leur avoit servi à souper. C’étoit là son prétexte. Mon fils la lui donna bonnement ; et aussitôt que ce voleur y fut entré, il commença à devaller les malles par la fenêtre à ses camarades, qui étoient au-dessous, et sort au plus vite pour s’enfuir avec eux et emporter leur butin. L’on voit par là qu’il ne se faut jamais confier à personne, ni en paix, ni en guerre. Mon fils étant revenu pour rentrer dans sa chambre, trouva la porte fermée et demanda qu’étoit devenu le cavalier. L’hôte lui dit qu’il étoit sorti. Ayant encore attendu là quelque temps, l’impatience le prit, et il fit enfoncer la porte, croyant qu’il y avoit du désordre : il ne se trompoit pas et en fut assuré aussitôt qu’il fut entré. Il court au prévôt afin de faire poursuivre les voleurs ; mais on ne put les joindre parce qu’ils avoient gagné les montagnes, et ainsi le tout fut perdu. Mon mari étant revenu au quartier pour prendre son fils et ses gens et s’en revenir chez lui, fut fort surpris d’apprendre qu’une personne à qui il se confioit de tout, eût été capable de le voler. Et néanmoins, il fallut s’en revenir légèrement et de bourse et d’autre chose. Cela étant assez ordinaire aux gens de guerre, j’y étois tout accoutumée. Cela ne me surprit point ; car tous ceux qui font profession de gens d’honneur n’amassent jamais rien à l’armée que de la