Page:La Gerbe, nouvelles et poésies, tome 2, série 1, 1859.djvu/106

Cette page n’a pas encore été corrigée

ernier, c’est plus sage ; une nécessité absolue m’appelle ailleurs, du reste ; je dois vous dire adieu.

— Vous mentez, André ; rien ne vous appelle hors d’ici. Pourquoi donc êtes-vous venu, alors ?

— Pour vous revoir une fois encore, me faire pardonner mon silence, et puis… vous dire adieu.

— Pour mourir, n’est-ce pas ?… Enfant, vous êtes resté jeune en dépit des années ; votre cœur, comme votre visage, a vingt ans… et vous parlez de mourir !… Mais vous ne l’aimez donc pas, cette Anina, puisque vous ne tenez pas à son estime, puisque vous ne voulez plus veiller sur son bonheur ? Qui vous dit que cet acte insensé ne sera pas un jour pour elle une douleur inguérissable ?… À ses yeux, vous êtes un ange ; pourquoi désillusionner cette pauvre enfant en vous montrant un homme, non pas un homme fort et vertueux, mais un homme faible ?… j’allais dire un lâche qui n’a point le courage de supporter la souffrance.

André avait courbé la tête en voyant devinées ses pensées de suicide ; il la releva.

— Elle ne le saura jamais, dit-il.

— Qu’en savez-vous ? Eh ! mon Dieu, il suffit pour cela d’un simple hasard. Pourquoi donc, ajouta la jeune femme comme à elle-même, pourquoi n’avez-vous pas eu confiance en moi ?