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Quant aux jeunes gens dont les parents ont demandé ses filles, et dont certains avaient une situation de fortune inespérée, ils offraient moins encore de sûretés morales.

« Et pourtant, ajoute-t-elle, je serais heureuse de bien établir mes enfants, que j’ai si bien élevés, qui seraient de bons époux et de dignes mères de famille dont la France a besoin.

« La classe riche de la société a les réunions mondaines pour y faire rencontrer sa jeunesse ; la classe ouvrière l’atelier, la rue, les bals publics ; mais la classe intermédiaire n’a rien. Elle est pourtant la plus intéressante et la plus forte parce qu’elle est la plus sage ; les abus et les misères mènent les riches et les pauvres à la dégénérescence. Pour qu’un mariage soit parfait, il faut aux époux la même éducation et c’est le difficile à trouver dans notre condition. »

Et l’excellente mère songe avec mélancolie à une idée d’Eugène Suë, qui eut beaucoup d’idées, et qui, dans un de ses romans, L’Orgueil, a imaginé une dame « ouvrant son salon à la classe laborieuse, honnête et choisie à laquelle personne ne pense et pour laquelle personne ne fait rien. »

Hélas ! le rôle du marieur est si discrédité que ni une dame, ni une œuvre n’oserait, je crois bien, l’assumer catégoriquement.

Faut-il donc se résigner à voir de plus en plus le meilleur de notre jeunesse condamné au célibat, faute de rencontres suffisantes pour que, entre toutes, se trouve le compagnon prédestiné. C’est là un souci digne de s’imposer aux réformateurs.