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Le Bouif errant

Boulogne et s’y engagea. Des rôdeurs le dévisagèrent.

— Je vais être assassiné, se dit le Bouif. On racontera cela dans les journaux et ça me fera une énorme publicité. C’est une belle fin.

Mais, à son grand étonnement, les rôdeurs ne lui demandèrent rien.

Une sorte de protection occulte semblait éloigner de Bicard tous les dangers extérieurs.

Maugréant, invectivant le sort, le Bouif errait dans les fourrés du Bois, se heurtant aux arbres et s’égratignant aux buissons. Il avait perdu sa route, Il parvint aux lisières du Bois sans se rendre compte.

Tout à coup, une masse lumineuse passa devant lui avec un bruit de ferraille et une vitesse qui le firent reculer vivement.

Le tramway de la Madeleine à Saint-James venait de le frôler.

— Je l’ai échappé belle, pensa Bicard, un peu saisi.

Alors il eut une idée.

— Je vais me coucher sur la voie du tram. Je fermerai les yeux. J’ai sommeil. Je m’endormirai et, demain matin, je me réveillerai dans l’Au-delà.

L’obscurité complète favorisait l’exécution de ce plan. Après avoir disposé son chapeau de paille sur une des voies pour s’en composer un oreiller, Bicard s’étendit en travers des rails et ferma les yeux obstinément, attendant le sommeil final.

Tout dormait autour de lui. Au loin, l’aboiement d’un chien attaché, qui hurlait son ennui aux étoiles, finit par agacer Bicard.