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Le Bouif errant

— Dans cette sacoche, ft Bicard. Avez-vous la monnaie à me rendre ?

Il avait ouvert la sacoche. Clairvil y jeta un regard rapide. Aussitôt sa figure revêche s’adoucit. Sa superbe se dégonfla et il devint d’une telle platitude que les naufragés en demeurèrent stupéfaits.

Car ni Bicard, ni Sava ni Mitzi ne connaissaient encore le mimétisme de certains metteurs en scène de cinéma.

Clairvil était un des plus rares spécimens de cette catégorie d’industriels ou l’on compte quelques hommes de talent pour une foule grandiose de remarquables incompétences.

Clairvil était, parmi les incompétents, un des plus considérables de la coterie. Il faisait d’ailleurs sa publicité lui-même et criait tellement haut qu’il était un homme de génie que les naïfs, à force de l’entendre, finissaient par le croire sur parole, Il faisait illusion par son impudence et impressionnait même les courriéristes de cinéma qui l’encensaient et publiaient dans leurs colonnes toutes les louanges que ce charlatan se décernait à lui-même.

De la sorte, ce Négrier photographe était, à force de platitudes et de petites infamies, parvenu à une notoriété photogénique. Ce sous-cabotin sans talent avait obtenu un grand commandement et même une certaine influence chez quelques Éditeurs français.

Les Éditeurs français sont des honorables Commerçants, qui respectent le Bluff, sous toutes ses manifestations extérieures. Clairvil était le Bluff incarné. Son assurance et sa grossièreté avaient im-