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Le Bouif errant

res. En somme, il venait de surprendre un secret que les diplomates dé Carinthie auraient payé cher : un secret qui eût empêché la Révolution. Bicard, qui se sentait une âme de Plénipotentiaire, édifiait déjà un système d’alliances entre les partis politiques, qui eût été fort habile en tout autre lieu qu’une île déserte.

Un choc brusque le ramena à la réalité des événements. Il venait de trébucher sur une caisse ; une caisse oblongue, échouée sur le rivage et à moitié enfouie dans le sable, comme toutes les épaves à l’usage des naufragés classiques.

Malgré sa confiance en lui-même, Bicard éprouva un saisissement. Cette obstination du hasard était vraiment miraculeuse. Tout se passait, dans la réalité des choses, comme dans l’histoire de Robinson.

Le couvercle de la caisse ne possédait ni serrure ni cadenas. Bicard le souleva sans efforts. La caisse contenait des armes, des lances, des sagaies, des casse-têtes, des sabres et de vieux fusils à piston et à capsules. Tout un bric-à-brac offensif, un peu rouillé : une armurerie démodée, bonne, tout au plus à armer des Pompiers, des sauvages et des Têtes-à-l’huile.

Le Bouif n’eut pas une minute d’hésitation. Tout cela provenait d’un navire jeté à la côte par l’ouragan qui les avait emportés eux-mêmes. Prenant un fusil et un sabre briquet, Bicard s’équipa en garde champêtre et partit explorer la côte.

Sur le plateau, dans le bois de tamaris, Mitzi et Sava attendaient. La jeune fille était un peu songeuse. Bicard tardait à revenir. Sava calmait son

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