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Le Bouif errant

— Remplacer du lilas blanc ? Vous ne vous êtes pas regardé. Et si vous croyez qu’un ballot de votre catégorie est un cadeau à offrir à une poule, c’est que vous avez des visions.

Le mot piqua au vif le gros monsieur, qui se congestionna beaucoup.

— Mais, parvint-il à articuler après quelques efforts convulsifs, je… vous m’insultez… et pourtant je ne vous connais pas. J’ignore totalement qui vous êtes.

— Évidemment, ricana le singulier client, en offrant ses fleurs écrasées au vaporisateur du garçon, afin de tâcher de leur restituer le parfum qu’elles avaient perdu. Vous ignorez mon état civil, parce que j’ai la modestie du vrai mérite et que je n’aime pas m’exhiber tout nu sur les murs, comme votre frère le Bébé Cadum. Cependant, si vous désirez m’adresser le montant de mes fleurs par mandat ou chèque postal, voici mon adresse et mon nom.

Il avait tiré une carte de visite fort sale de la poche de son gilet. Il la tendit au garçon coiffeur, salua la caissière et sortit.

Sur sa banquette, le gros homme avait repris son attitude de Bouddha somnolent.

Mais la dame comptable et le garçon se précipitaient sur la carte du singulier client et lisaient avec étonnement :

Alfred Bicard,
Dit le Bouif,
Ex Limonadier du Palais-Bourbon,
Ancien Ministre
.