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Le Bouif errant

ries sur le compte du nouveau Monarque. Très peu de courtisans le connaissaient, mais tous vantaient, à l’envi, sa distinction. C’était un concert de louanges exagérées. On relatait des faits, on parlait de l’ancien roi, auquel Sa Majesté ressemblait, traits pour traits. Et des groupes commentaient déjà les chances de son mariage avec la princesse de Kummelsdorf. Le concert de ces courtisaneries multipliées se transformait en cacophonie, quand les trompettes des Skipetars dominèrent tout à coup le tumulte annonçant l’arrivée du Roi.

Subitement le silence s’imposa. L’effervescence des courtisans s’éteignit. Tous les assistants se pétrifièrent dans une attitude respectueuse. La perspective de la grande salle n’offrit plus aux regards que des échines courbées, des épaules et des nuques prosternées.

Et seule la voix d’insecte du Grand Chambellan dissipa un instant la stupeur idolâtre des fidèles sujets en annonçant :

— Le Roi…

Sa Majesté venait d’apparaître, entre les tentures de velours bleu, brodées de pélicans d’or, qui fermaient l’entrée des petits appartements.

Les tambours battirent aux champs ; les soldats présentèrent les armes. Les trois pièces d’artillerie de la forteresse de Selakçastyr tirèrent les vingt et un coups réglementaires.

À ce bruit les conspirateurs se frottèrent les mains. Car cela détruisait une grande parte des munitions de l’armée. Mais le chef de l’opposition révolutionnaire calma ses hommes, afin d’observer le Roi.