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Le Bouif errant

Le trône était un meuble super-historique qui remontait à Dagobert, Roi des Francs.

Comment le fauteuil du Roi Dagobert était-il parvenu chez les arrière-descendants des Sarmates ? Les mystères de la Brocante sont insondables et seuls quelques vieux antiquaires eussent pu donner sur ce point des indications utiles en consultant leurs livres de commerce.

Ce fauteuil était particulièrement agencé. Le siège était de forme concave. La courbe creuse de la surface donnait au Monarque qui s’y asseyait l’attitude de Louis XIV recevant ses courtisans, sur sa chaise percée.

Pour ne pas être ridicules, les rois de Carinthie étaient donc obligés de reposer leur noble séant sur l’extrême bord de leur trône. Mais comme tout le poids de leur Majesté reposait alors sur un seul point du Dagobert, le trône du roi penchait dangereusement en avant et donnait la fâcheuse impression d’un équilibre monarchique fort instable, ce qui était symbolique.

À part cette légère critique, l’aspect de la salle du trône offrait, selon l’expression consacrée, un coup d’œil tout à fait féerique.

Les uniformes des Skipetars, cariatides vivantes, formaient une muraille d’or et de fourrures de chaque côté de la galerie. L’œil était séduit par les toilettes de Cour des dames et par les costumes des dignitaires ; par les livrées des pages et des huissiers, au milieu desquels le Grand Chambellan allait et venait comme la mouche du coche.

Une grande émulation se manifestait parmi les assistants. Chacun s’efforçait de rivaliser de flatte-