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Le Bouif errant

ment remarqué que Bicard n’avait ni l’âge, ni le physique d’un jeune homme.

Mais Bossouzof était myope et militaire. Ces deux infirmités l’empêchaient d’être clairvoyant.

De plus, il avait pu constater de ses yeux que son présumé souverain ne ménageait pas sa fatigue lorsqu’il s’agissait de son plaisir. Une pareille existence pouvait très bien avoir fait vieillir prématurément le futur roi de Carinthie. Les années de Montmartre comptent double.

Ce fut donc avec la plus entière bonne foi qu’il tira de sa serviette armoriée la proclamation du Conseil de la Couronne et commença d’une voix émue :

— Sire ! Les partisans du Pouvoir absolu, réunis en Assemblée solennelle, vous ont officiellement désigné pour relever le sceptre… de…

— Attendez un peu, fit Bicard, ce n’est pas assis dans un piano que je peux écouter des… allocations littéraires. Je vais chercher un uniforme officiel. Continuez votre discours sans moi. Je reviendrai vous dire ce que j’en pense…

Laissant le diplomate la bouche ouverte, il se précipita à la recherche du véritable Ladislas.

La chambre du prince avait également subi un bouleversement général. Tous les meubles étaient sens dessus dessous : le lit était saccagé, mais vide.

En revanche, si la chambre était déserte, le cabinet de toilette était habité.

Ça Va, couché dans la baignoire, parmi des coussins entassés, dormait du sommeil de l’homme juste qui n’a pas perdu sa journée.