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Scène V


Patrocle, Lydie


LYDIE.

Voilà donc votre amour ! C’est là cette tendresse
Que vous me promettiez, après qu’on m’eut ôté
Biens et sceptre, enfin tout, jusqu’à la liberté ?
Quand Achille s’en vint désoler notre terre,
Si quelqu’un signala son nom dans cette guerre,
Ce fut vous. L’oserai-je à ma honte avouer ?
Je cherchai dans mes maux matière à vous louer.
Aux dépens de mon cœur vous vous fîtes connaître
Ce me fut un plaisir de vous avoir pour maître,
Je ne regrettai point ce que j’avais perdu.
Je l’aurais refusé, si l’on me l’eût rendu.
Et vous, cruel, et vous, pour toute récompense,
Vous mettez avec moi votre gloire en balance !
Vous ne l’y mettez point ; j’ai pour vous moins d’appas ;
Cependant on a vu que je n’en manque pas’
Avant que d’être ici comme esclave emmenée,
Les monarques voisins briguaient mon hyménée ;
Tous me vinrent offrir leur aide en mes malheurs.
Je les vis tous périr, sans leur donner des pleurs ;
Je fis des vœux pour vous, ingrat, contre moi-même.

PATROCLE.

Que ces rois sont heureux ! mourir pour ce qu’on aime !
Mériter doublement de vivre en l’avenir !

LYDIE.

Je vous demande moins, et ne puis l’obtenir.
Ne me préférez plus un fantôme de gloire ;
Après m’avoir conquise, est-il quelque victoire