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D’ESOPE.

juſqu’à ce que Nectenabo Roy d’Egypte, ſur le bruit de la mort d’Eſope, crut à l’avenir rendre Lycerus ſon tributaire. Il oſa le provoquer, & le défia de luy envoyer des Architectes qui ſceuſſent baſtir une Tour en l’air, & par meſme moyen un homme preſt à répondre à toutes ſortes de queſtions. Lycerus ayant lû les Lettres, & les ayant communiquées aux plus habiles de ſon État, chacun d’eux demeura court ; ce qui fit que le Roy regreta Eſope, quand Hermippus luy dit qu’il n’eſtoit pas mort, & le fit venir. Le Phrygien fut tres-bien receu, ſe juſtifia, & pardonna à Ennus. Quant à la Lettre du Roy d’Egypte, il n’en fit que rire, & manda qu’il envoyeroit au Printemps les Architectes & le Répondant à toutes ſortes de queſtions. Lycerus remit Eſope en poſſeſſion de tous ſes biens, & luy fit livrer Ennus pour en faire ce qu’il voudroit. Eſope le receut comme ſon enfant ; & pour toute punition, luy recommanda d’honorer les Dieux & ſon Prince ; ſe rendre terrible à ſes ennemis, facile & commode aux autres ; bien traiter ſa femme, ſans pourtant luy confier ſon ſecret : parler peu, & chaſſer de chez ſoy les babillards : ne ſe point laiſſer