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Percer Mars, le Soleil et des vides sans fin ?
Un atome la peut détourner en chemin :
Où l’iront retrouver les faiseurs d’horoscope ?
L’état où nous voyons l’Europe
Mérite que du moins quelqu’un d’eux l’ait prévu :
Que ne l’a-t-il donc dit ? Mais nul d’eux ne l’a su.
L’immense éloignement, le point, et sa vitesse,
Celle aussi de nos passions,
Permettent-ils à leur faiblesse
De suivre pas à pas toutes nos actions ?
Notre sort en dépend : sa course entresuivie
Ne va, non plus que nous, jamais d’un même pas ;
Et ces gens veulent au compas
Tracer le cours de notre vie !

Il ne se faut point arrêter
Aux deux faits ambigus que je viens de conter.
Ce fils par trop chéri, ni le bon homme Eschyle,
N’y font rien : tout aveugle et menteur qu’est cet art,
Il peut frapper au but une fois entre mille ;
Ce sont des effets du hasard.


XVII

L’ÂNE ET LE CHIEN

Il se faut entr’aider ; c’est la loi de nature.
L’âne un jour pourtant s’en moqua :
Et ne sais comme il y manqua ;
Car il est bonne créature.
Il allait par pays, accompagné du chien,
Gravement sans songer à rien ;
Tous deux suivis d’un commun maître.
Ce maître s’endormit. L’âne se mit à paître ;