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Puis parmi d’autres paons tout fiers se panada,
Croyant être un beau personnage.
Quelqu’un le reconnut : il se vit bafoué,
Berné, sifflé, moqué, joué,
Et par messieurs les paons plumé d’étrange sorte ;
Même vers ses pareils s’étant réfugié,
Il fut par eux mis à la porte.

Il est assez de geais à deux pieds comme lui,
Qui se parent souvent des dépouilles d’autrui,
Et que l’on nomme plagiaires.
Je m’en tais, et ne veux leur causer nul ennui :
Ce ne sont pas là mes affaires.

X

LE CHAMEAU ET LES BÂTONS FLOTTANTS

Le premier qui vit un chameau
S’enfuit à cet objet nouveau ;
Le second approcha ; le troisième osa faire
Un licou pour le dromadaire,
L’accoutumance ainsi nous rend tout familier.
Ce qui nous paraissait terrible et singulier
S’apprivoise avec notre vue
Quand ce vient à la continue.
Et puisque nous voici tombés sur ce sujet :
On avait mis des gens au guet,
Qui, voyant sur les eaux de loin certain objet,
Ne purent s’empêcher de dire
Que c’était un puissant navire.
Quelques moments après, l’objet devint brûlot,
Et puis nacelle, et puis ballot,
Enfin bâtons flottant sur l’onde.