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Laisse en paix l’Univers, ne luy va point apprendre
Ce qu’il faut ignorer si l’on veut estre à soy.

Aussi bien manque-t-il icy ie ne sçais quoy
Que tu ne peus tracer, ny moy te faire entendre ;
J’en conserve les traits qui n’ont rien que de tendre ;
Amour les a formez plus grand peintre que toy.

Par d’inutiles soins pour moy tu te surpasses ;
Clarice est en mon ame avec toutes ses graces ;
Je m’en fais des Tableaux où tu n’as point de part :

Pour me faire sans cesse adorer cette Belle,
Il n’estoit pas besoin des efforts de ton art,
Mon cœur sans ce Portrait se souvient assez d’elle.


VII.

MADRIGAL

Pour la mesme.


Damon voyant Clarice peinte,
Soudain en ressentit l’atteinte ;
Il s’écria dans ce moment :
Est-il une beauté sur les coeurs plus puissante ?
Pendant que Clarice est absente,
Son Portrait luy fait un Amant.

    Jusques dans le tombeau je vous suy, cher espoux.
    Comme je vous aimay d’une amour sans seconde,
    Et que je vous louay d’un langage assez doux,
    Pour ne plus rien aimer, ny rien loüer au monde,
    J’ensevelis mon cœur et ma plume avec vous.

    (Menagiana, tome II, pages 83-85. Voyez aussi les Historiettes de Tallemant des Réaux, 3e édit. Tome III, pages 106-116.)