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PREMIERE PARTIE.


IV. — LE MARY CONFESSEUR.


Conte tiré des Cent Nouvelles Nouvelles.

 

Messire Artus, sous le grand Roy François,
Alla servir aux guerres d’Italie[1] ;
Tant qu’il se vid, aprés maints beaux exploits,
Fait Chevalier en grand’ceremonie.
Son general luy chaussa l’éperon ;
Dont il croyoit que le plus haut Baron
Ne luy deust plus contester le passage.
Si s’en revient tout fier en son Village,
Où ne surprit sa femme en Oraison.
Seule il l’avoit laissée à la maison ;
Il la retrouve en bonne compagnie,
Dansant, sautant, menant joyeuse vie,
Et des Muguets avec elle à foison.
Messire Artus ne prit goust à l’affaire,
Et, ruminant sur ce qu’il devoit faire :
Depuis que j’ay mon Village quitté,
Si j’estois crû, dit-il, en dignité
De cocüage et de chevalerie ?
C’est moitié trop : sçachons la verité.
Pour ce s’avise, un jour de Confrairie,
De se vestir en Prestre, et Confesser.
Sa femme vient à ses pieds se placer.
De prime abord sont par la bonne Dame
Expediez tous les pechez menus ;
Puis à leur tour les gros estant venus,
Force luy fur qu’elle changeast de game.

  1. Manuscrits de Conrart :
    S’en fut…..