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phete. La lecture des Livres Saints vous en a appris les principaux traits. C’est la que la Sagesse divine rend ses oracles avec plus d’élevation, plus de majesté et plus de force que n’en ont les Virgiles et les Homeres. Je ne veux pas dire que ces derniers vous soient inconnus ; ignorez-vous rien de ce qui merite d’estre sceu par une personne de vostre rang ? Le Parnasse n’a point d’endroits où vous soyez capable de vous égarer. Certes, Monseigneur, il est glorieux pour vous de pouvoir ainsi démesler les diverses routes d’une contrée où vous vous estes arresté si peu. Que si vostre goust peut donner le prix aux beautez de la Poësie, il le peut bien mieux donner à celles de l’éloquence. Je vous ay entendu juger nos Orateurs avec un discernement qu’on ne peut assez admirer ; tout cela sans autre secours que celuy d’une bien-heureuse naissance, et par des talens que vous ne tenez ny des Precepteurs ny des Livres. C’est aux lumieres nées avec vous que vous estes redevable de ces progrez dont tout le monde s’est estonné. Ce qui consume la vie de plusieurs Vieillards enchaisnez aux Livres dés leur enfance, la jeunesse d’un Prince l’a fait ; et nous l’avons vû, la renommée l’a publié. Elle a joint au bruit de vostre sçavoir celuy de ces mœurs si pures, et d’une sagesse qui est la fille du temps chez les autres, et qui le devance chez vous. Un merite si singulier a esté universellement reconnu. Celuy qui dispense les tresors du Ciel, et le Monarque qui, par ses armes victorieuses, s’est rendu l’Arbitre de l’Europe, ont concouru et de faveur et d’estime pour vous élever. Aprés des témoignages d’un si grand poids, mes loüanges seroient inutiles à vostre gloire. Je ne dois ajoûter