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A D O N I S .

Qui fut pleuré des Ris, qui fut plaint des Amours.
Amynte ; c’est à vous que j’offre cet ouvrage ;
Mes chansons et mes vœux, tout vous doit rendre hommage
Trop heureux si j’osois conter à l’Univers
Les tourmens infinis que pour vous j’ay souferts !
Quand vous me permettrez de chanter vostre gloire,
Quand vos yeux, renommez par plus d’une victoire,
Me laisseront vanter le pouvoir de leurs traits,
Et l’empire d’Amour accreu par vos attraits,
Je vous peindray si belle et si pleine de charmes,
Que chacun benira le sujet de mes larmes.
Voilà l’unique but où tendent mes souhaits.
Cependant recevez le don que je vous fais,
Ne le dédaignez pas, lisez cette avanture,
Dont, pour vous divertir, j’ay tracé la peinture[1].

Aux monts Idaliens un bois delicieux
De ses arbres chenus semble toucher les Cieux,
Sous ses ombrages verts loge la Solitude[2].
Là le jeune Adonis, exempt d’inquietude,
Loin du bruit des citez, s’exerçoit à chasser,

  1. Dans le manuscrit de 1658 on lit, au lieu de ces quatorze vers, ceux qui suivent :
    Foucquet, l’unique but des faveurs d’Uranie,
    Digne objet de nos chants, vaste et noble genie,
    Qui seul peux embrasser tant de soins à-la-fois,
    Honneur du nom public, defenseur de nos loix,
    Toy dont l’ame s’eleve au-dessus du vulgaire,
    Qui connois les beaux arts, qui sçais ce qui doit plaire,
    Et de qui le pouvoir, quoy que peu limité,
    Par le rare mérite est encor surmonté ;
    Voy de bon œil cet œuvre et consens pour ma gloire
    Qu’avec toy, l’on le place au temple de memoire.
    Par toy je me promets un eternel renom :
    Mes vers ne mourront point, assistez de ton nom.
    Ne les dédaigne pas, et ly cette avanture,
    Dont pour te divertir j’ay tracé la peinture.
  2. Manuscrit de 165?8 :
    Sous leurs ombrages verts…