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CONTES ET NOUVELLES.

Trop bien, minuit à grand’peine sonnant,
Le compagnon sans faute se va rendre
Devers l’endroit qu’Aminte avoit marqué.
Le rendez-vous étoit bien expliqué ;
Ne doutez pas qu’il n’y fût sans escorte.
La jeune Aminte attendoit à la porte :
Un profond somme occupoit tous les yeux ;
Même ceux-là qui brillent dans les Cieux
Estoient voilez par une épaisse nuë.
Comme on avoit toute chose préveuë,
Il entre vite et sans autres discours
Ils vont… ils vont au cabinet d’amours.
Là le Galant dés l’abord se récrie,
Comme la Dame étoit jeune et jolie,
Sur sa beauté ; la bonté vint aprés ;
Et celle-cy suivit l’autre de prés.
Mais, dites-moy de grace, je vous prie,
Qui vous a fait aviser de ce tour ?
Car jamais tel ne se fit en amour :
Sur les plus fins je prétens qu’il excelle,
Et vous devez vous-même l’avoüer.
Elle rougit, et n’en fut que plus belle ;
Sur son esprit, sur ses traits, sur son zele,
Il la loüa. Ne fit-il que loüer ?



IV. — LE REMEDE.


CONTE.


Si l’on se plaît à l’image du Vray,
Combien doit-on rechercher le Vray même ?
J’en fais souvent dans mes contes l’essay,
Et vois toûjours que sa force est extrême,
Et qu’il attire à soy tous les esprits.
Non qu’il ne faille en de pareils écrits