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TROISIESME PARTIE.

C’est luy pourtant. Oh ! oh ! Monsieur nostre barbon,
Nostre Legislateur, nostre homme d’ambassade,
Vous estes à cet âge homme de mascarade ?
Homme de ? la pudeur me défend d’achever.
Quoy ! vous jugez les gens à mort pour mon affaire
Vous qu’Argie a pensé trouver
En un fort plaisant adultere !
Du moins n’ay-je pas pris un More pour Galant :
Tout me rend excusable, Atis, et son merite,
Et la qualité du present.
Vous verrez tout incontinent
Si femme qu’un tel don à l’amour solicite
Peut resister un seul moment.
More, devenez Chien. Tout aussi-tost le More
Redevient petit Chien encore.
Favory, que l’on danse ; à ces mots Favory
Danse, et tend la pate au mary.
Qu’on fasse tomber des pistoles ;
Pistoles tombent à foison :
Eh bien, qu’en dites-vous ? sont-ce choses frivoles ?
C’est de ce Chien qu’on m’a fait don.
Il a basty cette maison.
Puis faites-moy trouver au monde une Excellence,
Une Altesse, une Majesté,
Qui refuse sa joüissance
A dons de cette qualité,
Sur tout quand le donneur est bienfait et qu’il aime,
Et qu’il merite d’estre aimé.
En eschange du Chien, l’on me vouloit moy-mesme ;
Ce que vous possedez de trop, je l’ay donné,
Bien entendu, Monsieur ; suis-je chose si chere ?
Vrayment vous me croiriez bien pauvre ménagere
Si je laissois aller tel Chien à ce prix-là.
Sçavez-vous qu’il a fait le Louvre que voila ?
Le Louvre pour lequel… Mais oublions cela ;
Et n’ordonnez plus qu’on me tuë,
Moy qu’Atis seulement en ses laqs a fait cheoir ;
Je le donne à Lucrece, et voudrois bien la voir