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DEUXIESME PARTIE.

Vient une Dame avec un jouvenceau.
Le lieu leur plaist, l’eau leur vient à la bouche,
Et le Galant, qui sur l’herbe la couche,
Crie, en voyant je ne sçay quels appas :
O Dieux, que vois-je, et que ne vois-je pas !
Sans dire quoy, car c’estoient lettres closes.
Lors le Manant, les arrestant tout coy :
Homme de bien, qui voyez tant de choses,
Voyez-vous point mon Veau ? dites-le moy.



XII. — L’ANNEAU D’HANS CARVEL.
Conte tiré de R.[1].


Hans Carvel prit sur ses vieux ans
Femme jeune en toute maniere ;
Il prit aussi soucis cuisans,
Car l’un sans l’autre ne va guere,
Babeau (c’est la jeune Femelle,
Fille du Bailly Concordat)
Fut du bon poil, ardente, et belle,
Et propre à l’amoureux combat.
Carvel, craignant de sa nature
Le cocuage et les railleurs,
Alleguoit à la creature
Et la legende et l’Ecriture,
Et tous les Livres les meilleurs ;
Blâmoit les visites secretes ;
Frondoit l’attirail des Coquetes,
Et contre un monde de recettes,
Et de moyens de plaire aux yeux,
Invectivoit tout de son mieux.

  1. . Rabelais, Pantagruel, liv. III, ch. 28.