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FABLES CHOISIES.

Je reviens à mon texte ; et dis premierement
Qu’on ne sçauroit manquer de loüer largement
Les Dieux et leurs pareils : de plus Melpomene
Souvent sans déroger trafique de sa peine :
Enfin qu’on doit tenir nostre art en quelque prix.
Les grands se font honneur dés lors qu’ils nous font grace.
Jadis l’Olympe et le Parnasse
Estoient freres et bon amis.




XV.
LA MORT ET LE MAL-HEUREUX.

XVI.
LA MORT ET LE BUSCHERON[1].



Un Mal-heureux appelloit tous les jours
La mort à son secours.
O mort, luy disoit-il, que tu me sembles belle !
Vien viste, vien finir ma fortune cruelle.
La mort crut en venant l’obliger en effet.
Elle frape à sa porte, elle entre, elle se montre.
Que vois-je ! cria-t-il, ostez-moy cet objet ;
Qu’il est hideux ! que sa rencontre
Me cause d’horreur et d’effroy !
N’approche pas, ô mort ô mort, retire-toy.

Mecenas fut un galand homme :
Il a dit quelque part[2]. Qu’on me rende impotent,

  1. Voyez page 8 l’apologue en prose de Patru sur le même sujet.
  2. Debilem facito manu,
    Debilem pede, coxa ;
    Tuber adstrue gibberum ;
    Lubricos quate dentes.
    Vita dum superest, bene est.
    Hanc mihi, vei acuta
    Si sedeam cruce, sustine.
    Ces vers sont rapportés par Sénèque dans son épître CI.