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FABLES CHOISIES.

Lui de crier, chacun de rire,
Monarque et Courtisans. Qui n’eût ri ? Quant à moi
Je n’en eusse quitté ma part pour un Empire.
Qu’un Pape rie, en bonne foi
Je ne l’ose assurer ; mais je tiendrois un Roi
Bien malheureux s’il n’osoit rire.
C’est le plaisir des Dieux. Malgré son noir sourci
Jupiter, et le Peuple Immortel rit aussi.
Il en fit des éclats, à ce que dit l’Histoire,
Quand Vulcain clopinant lui vint donner à boire.
Que le Peuple Immortel se montrât sage ou non[1],
J’ai changé mon sujet avec juste raison ;
Car puisqu’il s’agit de Morale,
Que nous eût du Chasseur l’avanture fatale
Enseigné de nouveau ? l’on a vû de tout tems
Plus de sots Fauconniers, que de Rois indulgens.




FABLE XIII.
LE RENARD, LES MOUCHES,
ET LE HERISSON.



Aux traces de son sang, un vieux hôte des bois.
Renard fin, subtil, et matois
Blessé par des Chasseurs, et tombé dans la fange,
Autrefois attira ce Parasite aîlé


    Et de ses ongles tout d’acier,
    Sauvage encore et tout grossier,
    Hape le nez du pauvre Sire.

    (Les Œuvres postumes.)

  1. C’est le plaisir des Dieux. Jupiter rit aussi,
    Bien qu’Homere en ses vers lui donne un noir soucy ;
    Ce Poëte assure en son Histoire,
    Qu’un Ris inextinguible en l’Olimpe éclata,
    Petit ni grand n’y résista,
    Quand Vulcain clopinant s’en vint verser à boire.
    Que le peuple immortel fust assez grave ou non,

    (Les Œuvres postumes.)