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LIVRE DOUZIÉME.

Celle que par malheur nos gens avoient soufferte
Ne put se reparer : le cas fut découvert.
Les voilà sans credit, sans argent, sans ressource,
Prêts à porter le bonnet vert.
Aucun ne leur ouvrit sa bourse.
Et le sort principal, et les gros intérêts,
Et les sergens, et les procez,
Et le creancier à la porte
Dés devant la pointe du jour,
N’occupoient le Trio qu’à chercher maint détour,
Pour contenter cette cohorte.
Le Buisson accrochoit les passans à tous coups ;
Messieurs, leur disoit-il, de grace apprenez-nous
En quels lieux sont les marchandises
Que certains gouffres nous ont prises.
Le plongeon sous les eaux s’en alloit les chercher,
L’Oiseau Chauve-Souris n’osoit plus approcher
Pendant le jour nulle demeure ;
Suivi de Sergens à toute heure
En des trous il s’alloit cacher.
Je connois maint detteur, qui n’est ni Souris-Chauve,
Ni Buisson, ni Canard, ni dans tel cas tombé.
Mais simple grand Seigneur, qui tous les jours se sauve
Par un escalier dérobé.




FABLE VIII.
LA QUERELLE DES CHIENS ET DES CHATS,
ET CELLE DES CHATS ET DES SOURIS.



La Discorde a toujours regné dans l’Univers ;
Nôtre monde en fournit mille exemples divers :
Chez nous cette Déesse a plus d’un Tributaire[1].

  1. La querelle des Chats, et des Chiens ; et celle des Chats et des Souris.
    La Discorde aux yeux de travers,