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LIVRE NEUVIÉME.

Expédiant les [1] Loups en forme.
Celuy-cy s’en douta. Serviteur au portier,
Dit-il, et de courir. Il estoit fort agile ;
Mais il n’estoit pas fort habile ;
Ce Loup ne sçavoit pas encor bien son métier.




XI.
RIEN DE TROP.



Je ne vois point de creature
Se comporter modérement.
II est certain temperament
Que le maistre de la nature
Veut que l’on garde en tout. Le fait-on ? nullement.
Soit en bien, soit en mal, cela n’arrive guere,
Le blé riche présent de la blonde Cerés
Trop touffu bien souvent épuise les guerets :
En superfluitez s’épandant d’ordinaire.
Et poussant trop abondamment,
Il oste à son fruit l’aliment.
L’arbre n’en fait pas moins ; tant le luxe sçait plaire.
Pour corriger le blé Dieu permit aux moutons
De retrancher l’excès des prodigues moissons.
Tout au travers ils se jetterent,
Gasterent tout, et tout brouterent ;
Tant que le Ciel permit aux Loups
D’en croquer quelques-uns ; ils les croquerent tous.
S’ils ne le firent pas, du moins ils y tâcherent ;
Puis le Ciel permit aux humains

La Fontaine. — I.
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  1. Il y a des dans le texte ; mais l’Errata remplace ce mot par les. L’avant-dernier vers de la fable est, dans le texte :
    Mais il n’estoit pas habile.
    C’est l’errata qui le complète.