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dépravés ; un vrai don Juan en burnous ! Du reste, hôte assidu de toutes les réceptions officielles, du gouverneur ou des préfets, sans se douter un instant que les invitations dont il était l’objet, avaient le même caractère que celles que l’on adresse aux chanteurs et aux prestidigitateurs en renom que l’on n’admet chez soi qu’à titre de curiosité, pour distraire les invités.

Le préfet reçut donc, quelques jours avant son départ, la visite du susdit qui le supplia de l’emmener à Paris avec lui.

Heureux d’exhiber un chef indigène — le préfet était nouveau en Algérie — l’affaire fut rapidement arrangée. Ils partirent ensemble. Inutile d’ajouter que pour la circonstance, le jeune caïd avait fait confectionner les caftans les plus luxueux, les haïks, serouels, kaflas, relillas les plus fantaisistes et les plus chamarrés. Ses turbans n’étaient que cachemire et soie, ses bottes, maroquin et or. Il n’avait pas oublié un harnachement et filali rechampi d’or.

Pendant la traversée, à Marseille et jusqu’à Paris, il fut charmant pour son grand chef, attentionné, gracieux aux petits soins, profitant de chaque occasion pour lui baiser la main « coram populo » sachant très bien, le fumiste, qu’il flattait ainsi l’amour-propre du préfet.

Ce dernier tout heureux d’attirer l’attention des voyageurs du paquebot se félicitait de sa bonne idée